Annales des Mines (1860, série 5, volume 18)
Page : Image 13
Révision de 26 janv. 2015 23:45:39, edited by Anonymes
20
ORDRE STRATIGRAPHIQUE
venu à donner de pareilles preuves. En dehors de l'explication tirée des bouleversements du sol, il ne reste pas d'autre opinion à adopter que celle de la réalité des exceptions paléontologiques.
La première manière de voir est celle qui se prébouleversements sente d'abord à l'esprit. Elle est conforme aux idées du sol est en opposition dominantes et ne change rien à l'habitude à peu près avec générale de classer les couches uniquement d'après L'explication
par les
l'observation.
les fossiles; mais une doctrine peut être commode sans pour cela être vraie. Celle-ci, dès qu'on veut la soumettre à la sanction de l'observation, soulève les plus grandes difficultés. Si dans les Alpes tous les cas exceptionnels se réduisaient à une simple superposition
inverse de celle qui devrait exister d'après la nature des restes organisés, on pourrait, au moins, dans un certain nombre de lieux, supposer un renversement dans
la stratification. Nous disons dans un certain nombre de lieux, car il en est où même l'hypothèse d'un simple renversement paraît inadmissible (1). Mais il s'en faut de beaucoup que les anomalies paléontologiques alpines soient en général aussi peu compliquées. Le plus souvent, on observe un groupe de couches A très-ré-
gulièrement stratifié, intercalé entre deux autres B et C, qui d'après leurs fossiles, devraient être l'un et l'autre, ou plus anciens ou plus récents que A. Il ne sert de rien alors de renverser tout cet ensemble. Quel que soit l'arc de cercle qu'on lui fasse décrire, si l'anomalie disparaît d'un côté, elle renaît de l'autre. Aussi, dans ce cas, les géologues qui ont adopté l'ex(i) Voyez, comme exemple de l'invraisemblance d'un simple
ET CARATÈRES PALÉONTOLOGIQUES.
1
plication par les bouleversements du sol, admettent qu'il y a eu un plissement. Il est clair que dans cette nouvelle hypothèse il ne peut pas être question de ces ondulations à grandes courbures ou de ces froissements accidentels que présentent presque partout les couches dans les montagnes, et qui n'empêchent pas que l'on ne saisisse très-bien leurs relations mutuelles. Pour qu'un plissement puisse être invoqué comme explication , il faut qu'il ait lieu en grand et qu'il soit à angle aigu. Il faut concevoir un système de deux as-
sises régulièrement superposées ayant éprouvé dans son ensemble un ou plusieurs contournements trèsétroits, dont les branches sont devenues exactement parallèles par la compression. Il peut résulter en effet d'un pareil accident stratigraphique une intercalation anormale. Mais comme des plissements aussi gigantesques et aussi extraordinaires ne manqueraient pas de frapper les yeux, et que cependant on n'en aperçoit aucune trace, les mêmes géologues qui les ont imaginés, supposent aussi que leur extrémité inférieure est restée cachée dans le sein de la terre ou bien que leur extrémité supérieure a été enlevée par une dénudation, ou même, lorsqu'il s'agit d'alternances répétées, que
ces deux cas se sont réalisés (1). Si l'on n'avait à expliquer qu'une seule anomalie, on comprend qu'à la rigueur une pareille hypothèse pourrait être soutenue, Mais il n'en est pas ainsi : les intercalations et les alternances en opposition avec les lois paléontologiques s'observent dans une foule de lieux, même sans sortir du terrain anthracifère. Or, nous le demandons, est-il raisonnable dans un pays comme les Alpes, où l'on
renversement, le mémoire de M. Favre Sur la géologie des bases de la montagne du 11161e en Savoie.(Archives des sciences physiques, etc., tome 56, page 554.)
(i) voyez, comme exemples de ces plissements, la plupart des coupes théoriques que l'on a données des Alpes.