Annales des Mines (1860, série 5, volume 18)
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TERRES VÉGÉTALES.
AZOTE ET MATIÈRES ORGANIQUES;
à découvert l'ancien charnier des Innocents, qui, pendant longtemps , fut le cimetière le plus important de Paris. J'ai choisi un échantillon de terre entouré par une multitude d'ossements humains ; il appartenait visiblement au terrain de transport marno-sableux déposé par la Seine; de jaune il était devenu noirâtre ; mais il était à peu près inodore, et il contenait... 1,12 d'azote. Une variété de cette même marne diluvienne, qui était fortement imprégnée par des matières orga-
niques et qui provenait de la Cité, en avait seulement... 0,40; enfin, une autre variété, prise dans la rue Sainte Élisabeth , n'en avait plus que 0,18 (Tableau IV). On peut considérer cette marne de la rue Sainte-Élisabeth comme étant à l'état normal ; en sorte que l'augmentation d'azote produite par le cimetière des Innocents est de... 0,94; par suite l'azote des matières organiques qui ont été absorbées reste inférieur à un millième. Enfin j'ai essayé également de la terre de cimetière,
qui était encore adhérente à des ossements pris dans les Catacombes de Paris. Cette terre s'était visiblement trouvée dans des conditions qui lui avaient permis de se saturer de matières organiques. Or, bien qu'elle fût argileuse, elle contenait moins de 4 d'azote, et je suis porté à croire qu'elle renfermait alors des débris d'os, car dans un autre échantillon, il y en avait seulement... 2 millièmes ; sa proportion d'azote était donc bien inférieure à celle du limon du Nil ou des Amazones. Ainsi, la terre qui reçoit un excès de matières organiques animales, comme cela a lieu pour un cimetière, ne conserve pas ces matières en proportion aussi
grande qu'on serait tenté de le croire; il est même très-remarquable qu'elle n'en retienne pas davantage. Il faut l'attribuer à ce que les matières organiques ani-
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males sont facilement décomposées, puis entraînées et dissoutes par les eaux qui s'infiltrent dans le sol. La terre de cimetière absorbe une proportion de matières organiques qui paraît dépendre essentiellement de sa composition minéralogique; cette proportion est d'autant plus grande que la terre est plus argileuse ; elle est inférieure ou au plus égale à celle des terres végé-
tales. Du reste, les terres végétales renferment ellesmêmes les débris d'une multitude d'animaux et de végétaux, en sorte qu'elles peuvent être considérées comme des terres de cimetières de l'époque actuelle.
Les roches ossifères qui enveloppent encore des squelettes entiers, ont visiblement reçu les cadavres des
animaux avant leur destruction complète ; par suite,
elles représentent une terre de cimetière antédiluvienne, remontant à une époque très-reculée. Je citerai notamment l'argile des cavernes à ossements, l'argile de Buénos-Ayres ; mais dans ces cimetières naturels et fossiles, l'azote de la terre ossifère atteint au plus quelques dix-millièmes, et on peut assurément être surpris qu'il y en ait aussi peu. Il est donc bien visible que les roches enveloppant des animaux, perdent, même avant la fin d'une époque géologique, les matières organiques azotées qui résultent de leur décomposition ; en sorte que l'azote des argiles ossifères ne dépasse pas celui des autres argiles. Les terres de cimetière qui appartiennent à l'époque actuelle absorbent bien une certaine proportion d'azote ; cependant elles en retiennent moins qu'un grand nombre de terres végétales et en particulier que les limons fertiles. Quoique les animaux soient plus riches en azote que (1)
fahresbericht, von J. Liebig und H. Kopp, 1855, p. 877.