Annales des Mines (1864, série 6, volume 5)
Page : Image 115
Révision de 29 mars 2015 15:59:38, edited by Anonymes
166
RAPPORT AU MINISTRE SUR LA LOCOMOTIVE A 4 CYLINDRES
lement ce chiffre établi, dit-il, « par l'expérience, » comment le concilier avec les expériences connues de tous les ingénieurs, avec l'exploitation même des voies ferrées, qui lui donne à tout instant d'innombrables et de si complets d émentis ?
« Une locomotive de Go tonnes et plus pour gravir des montagnes ! » s'écrie (page 392) M. le baron Séguier en faisant allusion à la machine, objet de ce rapport ; mais si elle pèse Go tonnes, ce n'est pas, Dieu merci, parce que l'adhéc'est tout simplement parce que cette marence est de
chine a une puissance inusitée, c'est parce qu'elle a une surface de chauffe de plus de 200 mètres quarrés. Spécifiquement, c'est au contraire une des plus légères qu'on ait jamais construites : elle pèse seulement, avec ses approvisionnements complets, 270 kilogrammes par mètre quarré de surface de chauffe, moitié de ce que pèsent beaucoup de machines à marchandises construites il y a quelques années et encore en service sur le chemin du Nord! Bien loin donc de faire à dessein les locomotives pesantes en vue d'augmenter leur adhérence, on s'attache au contraire à réduire leur poids par tous les artifices possibles ; et cela précisément parce qu'il s'agit de machines qui doivent employer à leur propre déplacement une fraction de leur travail mécanique, fraction qui croît rapidement avec l'inclinaison des rampes qu'elles gravissent. Cette réduction, si largement réalisée dans les machines de M. Petiet, constitue un de leurs caractères. les plus remarquables; et c'est seulement, encore une fois, dans le cas où ces deux éléments : vitesse et coefficient de l'adhérence (ou
un seul) auraient des valeurs moindres qu'au Nord, que la légèreté spécifique pourrait devenir exagérée. Malgré le soin avec lequel on s'est attaché, et à très-juste titre, à réduire le poids de ces puissants appareils, ils possèdent assez d'adhérence pour les conditions normales du service en vue duquel ils ont été conçus, c'est-à-dire à une
ET A 12 BOUES COUPLÉES DU CHEMIN DE FER DU NORD.
167
vitesse de 20 à 25 kilomètres environ, et sur une voie dont les conditions d'adhérence sont généralement favorables. Il n'en serait plus de même à une vitesse moindre, comme
celle qu'on pourrait admettre à la rigueur sur de fortes rampes, et avec l'adhérence réduite, fréquente dans les contrées montagneuses; la réduction du poids de la. machine
garnie ne devrait donc pas alors être poussée aussi loin qu'on s'est très-justement attaché à le faire au chemin de fer du Nord, et le poids remorqué s'en ressentirait.
Il est clair, en thèse générale, que les éléments d'une machine doivent toujours être proportionnés en raison des circonstances spéciales dans lesquelles elle doit fonctionner. Le rapport du poids mort au poids remorqué varie nécessairement suivant ces circonstances ; mais les avantages essentiels du principe n'en subsistent pas moins. Voie dans laquelle on doit chercher le véritable progrès. Améliorer la locomotive sans abandonner ses principes fondamentaux, et notamment l'adhérence ; chercher à augmenter sa puissance, sa flexibilité, en utilisant tout son poids pour l'adhérence, et en le répartissant sur un assez grand nombre de roues pour ne pas trop concentrer la pression sur rails; diviser le mécanisme moteur et les roues en deux groupes indépendants ; s'efforcer en même temps de ne pas dépasser, pour l'inclinaison des rampes, la limite au delà de laquelle une machine ainsi perfectionnée ne donnerait plus qu'un effet utile dérisoire ; puis, s'il est absolument impossible de se maintenir au-dessous de cette limite, renoncer franchement à la locomotive et demander à d'autres principes ce qu'elle ne peut plus donner alors, pas plus et même moins sans l'intermédiaire de l'adhérence qu'en l'utilisant: telle est, selon moi, m onsietir le ministre, la voie dans laquelle
on doit chercher le progrès ; et il me paraît difficile d'avoir quelque confiance dans des solutions bâtardes, qui accolent à la locomotive un attirail plus ou moins analogue à celui qu'exige jusqu'à présent la traction par machines fixes et qui