Annales des Mines (1885, série 8, volume 8)
Page : Image 53
Révision de 1 mars 2015 04:55:06, edited by Anonymes
70
THÉORIE CELLULAIRE
froidissement général se poursuit et un moment arrive où le lingot intérieur liquide atteint la température de solidification. Alors des centres mobiles d'organisation se
forment dans ce lingot intérieur et, comme ils peuvent s'accroître dans tous les sens, constituent la partie centrale à l'état de polyèdres. Ainsi s'explique très simplement la double structure si fréquemment observée dans les lingots, prismatique à la périphérie, polyédrique à l'intérieur (1 Mais les phénomènes physiques de la solidification sont accompagnés de phénomènes mécaniques dus au retrait de la partie extérieure solidifiée la première. Tchernoff a indiqué et M. Barba, de son côté, a démontré mathématiquement que le refroidissement des lingots peut se diviser en deux périodes : l'une, pendant laquelle l'extérieur du lingot se refroidit plus vite que l'intérieur et par conséquent le comprime ; l'autre, pendant laquelle l'intérieur se refroidit plus vite que l'extérieur et se trouve soumis à des efforts de traction. Combinons maintenant les deux séries de phénomènes,
physiques et mécaniques : nous avons vu plus haut comment les agglomérations voisines se limitaient mutuellement par des faces grossièrement planes et prenaient ainsi des formes prismatiques ou polyédriques. N'oublions pas que ces prismes et ces polyèdres sont des amas de globulites solides enduits de leur ciment encore liquide, et soumettons-les à une pression, comme il s'en produit en effet pendant la première période du refroidissement; le ciment liquide va s'échapper facilement, de (*) Rien de plus facile que d'imiter synthétiquement ces formes en comprimant clans un moule des sphères ou des cylindres d'un corps plastique quelconque. Avec des balles de plomb, on reproduit parfaitement ( fig. 4, PI. I) l'aspect des polyèdres de l'acier
brillé (fig. 5, PI. I) qui ont la même origine que ceux de l'acier coulé.
DES PROPRIÉTÉS DE L'ACIER.
71
l'extérieur à l'intérieur du lingot, par les plans de contact qui lui offrent des routes ouvertes ; la cellule composée de deuxième ordre sera ainsi constituée et constituée sans enveloppe. Dans la partie centrale qui s'est solidifiée sans pression, le ciment n'a pu être expulsé d'entre les polyèdres que par le poids relatif de ces derniers ; aussi trouve-t-on
rarement à l'intérieur des lingots de vrais polyèdres à faces nettes ; les cellules composées de deuxième ordre y sont plus ou moins anastomosées et n'y ont pas d'individualité bien définie (fig. 3, Pl. I) (*).
La formation des cellules composées par accroissement régulier autour d'un centre d'organisation suppose, comme tout arrangement de ce genre, un facteur essen-
tiel, le temps. Il doit donc exister une certaine vitesse limite de refroidissement au delà de laquelle les cellules composées ne se forment pas ou ne se forment que très imparfaitement; aussi bien la structure géométrique n'est-
elle franchement accusée que dans les lingots Coulés assez chauds. En deçà de la vitesse limite, la formation des cellules composées est facile et leur volume augmente à mesure que le refroidissement devient plus lent. Si on connaissait
les lois du refroidissement, on pourrait presque déterminer à l'avance par le calcul, pour une température de coulée donnée, les dimensions des cellules composées.
E. Conclusions. L'exposé et la discussion des expé(*) Le ciment est refoulé de l'extérieur à l'intérieur par la pression due au retrait des couches solidifiées et son poids spécifique relativement faible le fait monter à la tête des lingots : ces deux
Causes combinées tendent à amasser le ciment dans la partie centrale supérieure des lingots. De là les accumulations de carbone, de soufre et de phosphore qu'on y rencontre et dont la présence justifie l'usage des masselottes, du moins pour les grandes masses dont le refroidissement est très lent.