Annales des Mines (1892, série 9, volume 2)
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roulage, sur un parcours de quelques kilomètres, n'a pas une très grande importance, et ne semble par suite pas devoir ajouter beaucoup au trafic préexistant. Le trafic nouveau à la création duquel le chemin de fer est indispensable, est celui qui ne pouvait pas supporter les frais de camionnage, c'est-à-dire celui des produits de médiocre
valeur, qui ne vont guère aux grandes distances. Il faut, sans doute, faire exception pour le cas où la vitesse présente un intérêt de premier ordre, qui est précisément. celui des embranchements de Bretagne, ou bien pour le cas des marchandises pondéreuses, comme les houilles et certains matériaux de construction, qui, malgré leur peu de valeur, se répandent à de très grandes distances, parce que la production en est localisée et la consommation générale. Mais en dehors de ces exceptions, c'est surtout le trafic local qui paraît devoir se développer grâce aux petites lignes. De même, pour les voyageurs,
quelques kilomètres de plus ou de moins .à faire en
voiture n'exercent pas une influence capitale sur le coût, sur la durée, et par suite sur le nombre des voyages à grande distance ; ce sont les relations avec la ville voisine que l'embranchement transforme, et que, par suite, il développe dans une très large mesure. Il ne faut évidemment pas exagérer la valeur de ces raisonnements, et nous admettrons très volontiers que, aussi bien pour le trafic à grande distance que pour le trafic local,
les transports qui ne pouvaient pas supporter les prix antérieurs à la création du chemin de fer d'embranchement ne seront pas les seuls que ce chemin de fer fera naître. Il y a certainement des transports dont la valeur est très supérieure au prix payé sur l'ancienne route, qui eussent par conséquent fort bien pu payer ce prix, et qui cependant ne se seraient jamais opérés sans la construction du chemin de fer. C'est, en effet, s'exposer à de grandes
erreurs, en économie politique, que d'admettre, comme
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l'ont trop souvent fait certains maîtres de la science, qu'il suffise qu'une opération soit praticable et lucrative pour qu'elle s'effectue. La routine est, dans bien des cas, le-plus grand obstacle au progrès, et de même que, pour vendre un produit, si avantageux qu'il soit, il faut savoir solliciter l'acheteur de vingt manières, de même, pour développer les échanges les plus lucratifs entre divers pays, il faut que les moyens de transport attirent et appellent la clientèle, par une sorte de publicité. Or, la pré-
sence seule d'une gare dans un pays constitue, à cet
égard, la publicité la plus efficace. Tel particulier, qui ne songeait pas à aller chercher hors de son village des débouchés qu'il eût d'ailleurs pu trouver depuis longtemps, commencera à y songer, le jour où il verra, à côté do lui, une station par laquelle on peut entrer en communication directe avec le chef- lieu de la région, en même temps qu'avec toute la France. Au point de vue des arrivages, qu'il faut aller chercher à la gare sans choisir son moment, l'importance des facilités dues au voisinage de cette gare est souvent plus grande que celle de l'économie sur le coût du camionnage. Il y a là une action de présence des chemins de fer, qui s'ajoute à celle que produit l'abaissement même du prix de transport, et qu'il ne faut pas négliger; M. Considère l'a très justement mise en lumière. Mais sans la négliger, il ne faut pas non plus en exagérer l'importance, car malheureusement l'expérience montre que ces éléments de trafic latents sont fort lents à se développer, que la routine subsiste, même là où le chemin de fer pénètre, et qu'en faisant trop grand fonds
sur les transports de cette ,nature, on s'expose à de
graves déceptions. Quand on a eu souvent l'occasion de comparer les prévisions faites pour le produit d'une ligne, avec les recettes réalisées effectivement même plusieurs années après son ouverture, on est frappé de voir à combien de mécomptes donnent lieu les calculs basés