Révisions de la page | Historique de transcription | Annales des Mines (1906, série 10, volume 9)

328

LA GENÈSE DES EAUX THERMALES

sauter tous les obstacles. Pour expliquer cette irrégularité du régime des volcans et les périodes séculaires qui séparent les grands cataclysmes, l'obstruction des conduits souterrains, que l'on invoque, ne saurait être admise, alors que les émissions continues de gaz et de fumées, et dans quelques cas, comme au Stromboli et au Kilauea, l'ascension rythmique des laves visibles dans le cratère lui-même, démontrent, au moins pour les volcans non éteints, que les conduits souterrains sont en partie libres. Toutes ces difficultés d'interprétation disparaissent, si, comme nous le pensons, l'eau est brusquement apportée dans ces régions profondes de la croûte du globe où règne la température du rouge, au hasard des conditions de déséquilibration que créent les fractures et tassements subits des assises terrestres. Le phénomène de la contraction lente, mais continue, des couches extérieures de notre planète qui se refroidissent et se contractent différemment aux pôles et à l'équateur, au fond des océans et sous les montagnes, augmente sans cesse l'instabilité de cet équilibre. Elle s'accroît encore en raison de la différence des vitesses de sédimentation, positives dans le bassin des mers, négatives sur les continents. Il en résulte des tassements irréguliers, une répartition inégale des pressions sur les voussoirs de la croûte terrestre et, comme conséquence, des tassements ou effondrements subits à des époques essentiellement variables. La réalité de ces grands effondrements, d'ailleurs localement jalonnés par des volcans ou par des épanchements de roches d'origine ignée, est indéniable. Parmi les plus importants, je me bornerai à citer celui qui amena la dépression du bassin de la Hongrie, effondrement contemporain des éruptions andésitiques des volcans de Transylvanie ; l'affaissement du bassin de la mer Noire reliée aux volcans du Caucase ; les affaissements successifs qui formèrent la mer Méditerranée en rapport avec la for-

ET SES RAPPORTS AVEC LE VOLCANISME

329

mation des volcans de la Catalogne espagnole, du Vésuve, de la Sicile, des iles Lipari et de la côte asiatique ; les grands lacs africains avec leurs volcans éteints ; les vastes tassements qui formèrent l'Atlantique, dont les coulées éruptives des Hébrides et des Orcades, les volcans des Açores, de Madère, des Canaries, des iles du Cap-Vert conservent le témoignage ; enfin l'immense approfondissement du Pacifique et celui du golfe du Mexique etdes Antilles, deux grandes mers dont presque toutes les Iles sont volcaniques et qui sont, encore à notre époque, les régions terrestres les plus tourmentées par de terribles éruptions. Parmi ceux de ces effondrements dont l'homme a été le témoin, je me bornerai à rappeler l'engloutissement partiel de l'île de Krakatau, dans le Pacifique, qui, en 1883, sur une surface de 20 kilomètres carrés, fit disparaître dans la profondeur de la mer une montagne de 800 mètres d'altitude, en même temps que son cratère lançait une colonne de fumées et de cendres de plus de 15000 mètres de hauteur, et soulevait l'onde marine, qui fit le tour complet du globe. Rappelons que la terrible éruption du Vésuve qui détruisit Pompéi, en l'an 79, avait été précédée, peu d'années avant, de tremblements de terre qui avaient presque détruit la ville. Pour montrer encore mieux le rapport direct des effondrements du sol avec les éruptions volcaniques, je cite ici, d'après E. Suessf) entre tant d'autres exemples, comment se sont produits en Sicile, de 1780 à 1878, les éruptions volcaniques et les grands séismes dus à ces affaissements : « Après être resté inactif pendant quatorze ans, l'Etna. ' (*) E. SUESS, la Face de la Terre, traduction française, Paris, t. I, p. 228.

189",