Révisions de la page | Historique de transcription | Annales des Mines (1909, série 10, volume 16)

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LES QUESTIONS

ET LA SCIENCE

OUVRIERES

ACTUARIELLE

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de sa compréhension et à raison de son aspiration constante vers l'absolu qui lui semble l'équivalent du vrai. Mais la moyenne n'est qu'un jalon planté sur la route qui conduit à la vérité ; elle doit disparaître lorsque le trajet est accompli ; de même que l'architecte enlève, après la reprise en sous-oeuvre, les témoins disposés dans la façade du monument qu'il répare, de même le statisticien doit faire abstraction des moyennes après l'achèvement des investigations qu'il poursuit. Aussi bien 1' « effet moyen » d'un phénomène social est-il celui dont la mensuration est la moins instructive, puisqu'il ne répond à aucune condition de la réalité : ce qu'il conviendrait de mesurer, ce sont les « effets réels », et la moyenne de ces mensurations constituerait la « moyenne statistique » dont l'usage devrait être limité au rôle effacé d'un auxiliaire discret. De plus, même en reléguant la fonction de la moyenne, une fois découverte, à cette place subsidiaire, le patronage de la méthode de Quetelet est-il si enviable pour les économistes mathématiciens ? Cette recherche universelle de la moyenne comme caractéristique des phénomènes sociaux doit-elle être le perpétuel objectif du sociologue éclairé ? Ne doit-on pas craindre que cette constante préoccupation ne l'entraîne à ignorer les contingences ou à les qualifier d'exceptions anormales lorsqu'elles contredisent des conceptions a priori ou le résultat obtenu d'investigations antérieures ? L'intelligence de l'homme n'est que trop souvent en quête de solutions lapidaires dont la simplicité est tentatrice, mais dont l'acceptation n'est que l'aveu inconscient de l'infirmité humaine ; dans notre impuissance à envisager tous les aspects des phénomènes, nous éprouvons un sentiment de repos à considérer sous une forme synthétique l'expression prétendue des faits dont nous achetons, en les dénaturant, la simplification cherchée.

aux États-Unis le nom de statisticien ». Mais l'économief politique et la sociologie font intervenir non seulement des quantités, mais encore des éléments qui ne sont pas susceptibles de mesure, parce qu'ils ne dépendent que de la volonté humaine. Sans doute, M. Maingie n'admet pas l'objection de ceux qui estiment que « la liberté humaine ne se laisse pas mettre en équation » : il invoque l'analogie entre l'économique et la mécanique, et il déclare que l'objection est basée sur «l'ignorance des mathématiques» et de « leur esprit »"(*). Dussé-je, malgré mes antécédents scientifiques, encourir cet anathème, je n'hésite pas àdire que l'assimilation établie par M. Maingie entre l'économique et la mécanique ne porte point : certes, il y a une économique pure et, une économique appliquée comme il y a une mécanique rationnelle et une mécanique appliquée; mais la mécanique, à la différence de l'économique, ne fait pas intervenir le facteur humain. Me sera-t-il permis d'ajouter que la constatation du botaniste, retrouvant la loi de Weber dans le domaine végétal, offre des garanties d'exactitude bien autrement sérieuses que la constatation du psychologue qui énonce dans la sphère de la sensibilité humaine une relation logarithmique entre l'action et la réaction? Moins la volonté intervient, plus la vie peut être systématisée ; le mathématicien triomphe dans le règne minéral où le polyèdre obéit sans murmure aux lois géométriques de la cristallographie. M. Maingie (**) voit d'ailleurs dans « les essais de Quetelet des procédés de mensuration indirecte de phénomènes sociaux, par la mesure de leurs effets moyens ». Nul statisticien ne conteste, et moins que personne je contesterai l'utilité des moyennes en statistique : l'esprit humain doit y recourir à la fois par suite du caractère fini (*) Loc. cit., p. 1390. (**) Ibid., p. 1393.

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