Révisions de la page | Historique de transcription | Annales des Mines (1909, série 10, volume 16)

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LES QUESTIONS OUVRIÈRES

Est-ce à dire que les mathématiques doivent être bannies de la science économique ou sociale et que le mathématicien ne puisse être économiste ou sociologue? Non certes. Mais le rôle des mathématiques en économique et en sociologie ne doit pas être prépondérant. Ce que l'on peut demander aux mathématiques en économie politique et en sociologie, c'est la représentation des lois constatées ; les mathématiques figurent par des symboles avec plus de concision que le langage les relations mutuelles des phénomènes ; mais la recherche de ces relations, la « prospection», selon l'expression de M. Maingie, est l'œuvre de l'économiste et du sociologue,, non du mathématicien. Telle paraît bien être l'opinion de M. Lembourg (*) : « Grâce à l'application des mathématiques, écrit-il, on, procédera infiniment plus vite et avec infiniment plus de certitude que par les procédés empiriques que l'on emploie actuellement. » Abstraction faite de la sévérité du jugement qui la termine, cette affirmation semble demander à l'actuaire une collaboration plutôt qu'une direction, et je n'exprimerais pas un doute à cet égard, si je' ne relevais la hardiesse, téméraire selon moi, avec laquelle M. Lembourg déclare « que la méthode mathématique pourra conduire plus rapidement à des résultats utiles, ou a des constatations scientifiques nettes, que la simple observation ». Si, en effet, la « simple observation » ne suffit point à dégager les lois, ce n'est pas l'absence des mathématiques qu'il faut mettre en cause, c'est l'absence de la déduction qui, pour être la méthode du mathématicien, n'est nullement subordonnée à l'emploi des sciences mathématiques. Mais, bien que réduite à ces limites, l'intervention du mathématicien et en particulier de l'actuaire ne sera ni (*) Loc. cit., p. 1376.

ET LA SCIENCE ACTUARIELLE

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superflue ni effacée sur le terrain économique social. Le domaine de la prévoyance, tant sociale qu'individuelle, s'ouvre largement à l'actuaire qui doit y faire prévaloir les règles de la science des assurances ; de plus, l'actuaire, par le concours prêté à l'économiste et au sociologue, pourra faire apprécier la valeur des ressources fournies par les mathématiques comme traduction des résultats obtenus ; enfin, par l'étude de la science sociale et de la science économique, il acquerra les idées générales qui sont une double condition de son influence morale et de son perfectionnement intellectuel (*). Selon la très juste expression de M. Bischoff, directeur de la compagnie d'assurance-vie la Teutonia, de Leipzig, « la véritable science de l'actuaire ne se réduit nullement à l'art de calculer et de formuler : le technicien qui dirige une entreprise doit être un politique d'affaires dans la plus large acception du terme (**) ». Pour lui (***), la technique de l'assurance doit triompher de tous les obstacles qui s'opposent au développement de l'entreprise : elle doit connaître et satisfaire les besoins et les intérêts, tenir compte de l'opinion publique et chercher à agir sur le milieu dont la constitution peut déterminer le succès de l'assurance. A la lumière de l'expérience allemande, M. Bischoff (****) montre l'importance qui s'attache à développer chez l'économiste et le sociologue les notions relatives au fonctionnement de l'assurance pour qu'ils évitent dans l'enseignement et dans la législation les préjugés et les erreurs nuisibles à la prospérité de l'institu-

(*) Voir., ci-après, p. 91, Annexe n" 2, le développement de ces considérations que j'ai présenté de vive voix au Congrès de Vienne, le H juin 1909. .('*) Rapports présentés au 6" Congrès international d'Actuaires, Vienne, 1909 I, p. 1402. (***) Ibid., 'y. 1402. (****) Ibid., p. 1409.