Annales des Mines (1911, série 10, volume 19)
Page : Image 256
Révision de 28 janv. 2015 01:53:58, edited by Anonymes
504
LES
MINERAIS
STRATIFORMES
Ce fait n'est pas sans quelque intérêt môme pour la géologie générale, car le mode de rattachement des Baléares aux chaînes du continent demeure, on le sait, très problématique, et l'on peut se demander tout d'abord quel est le rôle de ce témoin tout à fait isolé d'un permo-trias cuprifère dans la Méditerranée. Aussi j'insisterai un peu sur ces gisements, dont une description espagnole a été publiée par M. Rafaël Sanchez Lozano (*) en utilisant des renseignements de même origine que les miens. L'île de Minorque a été coupée en deux parties bien distinctes par les accidents tertiaires (surtout éocènes) : au Sud, des terrasses horizontales miocènes, qui ne nous intéressent pas ici; au Nord, des terrains dévoniens à plissements Nord-Sud avec intercalation de trois principaux lambeaux permo-triasiques effondrés entre des failles et manteau local de lias transgressif. On a trouvé du cuivre dans deux de ces lambeaux permo-triasiques, surtout dans la" partie centrale de l'île, à la Rubia, à 8 kilomètres Sud du port de Fornelles, immédiatement audessus du Mercadal, entre ce village et le mont Toro, où ont été faits les derniers travaux des recherches, accessoirement à Santa-Theresa. Le trias métallifère est composé de grès bariolés que surmontent dos calcaires gris à tubulures rattachés au muschelkalk, par-dessus lesquels arrive le lias. Dans ces grès bigarrés, inclinés environ à30° sur l'horizon, s'intercalent, en apparence à trois niveaux distincts espacés de 1 mètre à l m ,90, mais peut-être, en réalité, sur un même niveau ramené par des failles, des formations dfr schistes argileux contenant un mince lit de houille cui(*) Bolelin de la Comision del mapa geologica, 2° série, t. VI, 12 p. — Criaderos sedimenlarios de cobre en Menorca y en Granada. — CfD. JAIME FERHER (Bol. de la Soc. esp. de Hist. Nat., t. 1, n° 9). (**) 1885, NOLAN, Structure geol. d'ensemble de l'archipel Baléare (Bul. Soc. Geol., 3" série, XXI11, p. 76-91) et Trav. du labor. de Grenoble, III, 1894, p. 29-44.
DE
LA
CHAINE
HERCYNIENNE
505
vreuse à galets de chalcosine. Ces couches de houille, leur toit, leur mur, leur composition, sont tout à fait identiques entre elles; en outre, des apparences de plan de glissement que l'on a cru remarquer ont pu faire supposer une sorte d'imbrication par écailles, d'où la vraisemblance qu'il n'existe qu'une seule couche disloquée. Le gisement, malgré de très grandes richesses locales, a donc paru trop irrégulier pour être pratiquement exploitable. Mais on n'en a pas moins constaté, sur une centaine de mètres, l'existence d'un lit charbonneux d'environ 2 centimètres de large, contenant de véritables galets aplatis de chalcosine, qui arrivent à lui assurer une teneur de 35 à 60 0/0 de cuivre. Cette chalcosine (*) n'est peut-être qu'un premier stade d'une altération de chalcopyrite, qui, aux affleurements, donne souvent des malachites. Il est probable qu'il faut voir là le produit de la destruction des filons cuivreux hercyniens, sans doute situés dans une partie de la chaîne disparue lors des effondrements tertiaires et dont un représentant existe encore, dit-on, sous la forme d'un quartz cuivreux dans l'île de Colon. A cette destruction mécanique n'a pu manquer de s'ajouter — la présence de la houille le montre assez — une dissolution suivie d'une reprécipitation par réduction. Nous sommes vraisemblablement ici en présence d'une exagération de ce phénomène bien connu qui a précipité le cuivre en chalcosine sur tous les troncs carbonisés du permien de la Hesse, de la Westphalie,de la Bohême, de l'Oural, etc. La matière végétale étant ici plus rassemblée, au lieu de simples troncs cuprifères, on aura eu un véritable niveau do houille cuivreuse, qui constitue une curiosité minéralogique (**). (*) Par endroits la chalcosine est, paraît-il, antimonieuse. (**) C'est, comme je l'ai déjà fait remarquer plus haut, l'équivalent, 4 u métal près, des houilles pyriteuses que l'on trouve si fréquemment.