Révisions de la page | Historique de transcription | Annales des Mines (1884, série 8, volume 3, partie administrative)

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COMMISSION DES MINES

DE L'ANNAM ET DU TONKIN.

inquiétés de la perpétuité des concessions. On a soutenu que, lorsqu'il s'agissait d'un privilège, il eût été sage de limiter la durée de la concession, de façon que, à l'expiration de cette concession, les mines fissent retour a l'Etat, comme propriété de la nation, suivant l'expression de Mirabeau. » Et votre honorable collègue ajoutait : « Ce n'est qu'après de'longs débats que le principe de la propriété perpétuelle a été admis, et c'est surtout pour la meilleure utilisation de nos richesses minérales, en raison des risques considérables et de l'importance des fonds à engager, que le législateur de l'époque s'est décidé dans ce sens et a voulu donner une large sécurité aux concessionnaires; il n'est pas possible de contester que le développement des exploitations, que l'extension de celte grande industrie, qui commande presque toutes les autres, sont dus en grande partie au régime inauguré par la loi de 1810. » Ce sont ces considérations d'un ordre élevé qui ont déterminé la majorité de la commission a résister à la minorité. Sans se dissimuler les quelques avantages que pouvait offrir, pour les intérêts du Trésor, la durée temporaire de la propriété des mines, à l'égard de laquelle la minorité, après avoir proposé le terme de cinquantS ans, comme dans notre loi de 1791 et dans une loi faite, en 1808, par Napoléon, pour l'Italie, était amenée à admettre celui de soixante-quinze ans et même de quatre-vingtdix-neuf ans, comme en Turquie, — la majorité a pensé que l'État sacrifierait aux avantages douteux qu'il pourrait espérer, dans l'avenir, les avantages certains et immédiats que le présent doit lui procurer. En effet, en présence de l'universalité des législations actuelles admettant le principe de la perpétuité de la propriété des mines, l'abandon de ce principe pourrait être, surtout pour une colonie, une innovation dangereuse, par cela seul qu'elle serait, moralement, tout au moins, de nature a écarter les capitaux de l'industrie minérale, que le Gouvernement français a à cœur de créer dans l'Annam et au Tonkin. L'inconvénient de cette perpétuité sera, du reste, d'autant moins grand, pour l'État, que l'étendue de chaque périmètre adjugé sera plus convenablement déterminé, de façon à ne point excéder celle nécessaire a l'établissement d'un siège d'exploitation rationnellement conçu. Enfin les intérêts du Trésor seront complètement sauvegardés par la perception d'une taxe superficiaire (art. 45), relativement élevée, ainsi que je vais l'expliquer, — indépendamment d'un impôt, purement fiscal, sur le produit des mines à l'exportation (art. 47).

Qu'une mine soit créée par prise de possession ou par adjudication publique, elle est, à partir de son institution, soumise à un ensemble de règles. La commission s'est efforcée de les formuler en termes tels qu'elles offrent une sécurité complète aux entreprises sérieuses, — qu'elles n'apportent aucune entrave au libre développement des exploitations, — qu'elles constituent, au contraire, un régime légal éminemment favorable à l'extraction des substances minérales, — mais aussi que, dans les limites du possible, elles permettent d'éloigner ces spéculateurs qui se bornent à acquérir des mines, sans intention de les exploiter et uniquement pour les revendre, en les grevant ainsi d'un capital excessif, lequel suffit trop souvent à transformer une entreprise sortable en détestable affaire. C'est particulièrement afin d'atteindre ce but que la commission, — pour chacune des trois catégories de mines qu'elle a été amenée a distinguer (art. 2) relativement a la nature des substances minérales, en vue d'écarter toute difficulté pouvant résulter de leur connexité dans un même gisement, — a fixé le taux d'une taxe superficiaire qui, ainsi proportionnée à l'étendue du périmètre occupé, n'est point assez élevée pour paralyser les efforts de l'exploitant et l'est cependant suffisamment pour qu'il ait généralement un intérêt véritable à ne pas laisser son périmètre improductif. Cet impôt a paru a la commission de nature a entraver la concentration, dans les mêmes mains de surfaces considérables non exploitées, laquelle constitue, a tout prendre et pour rester sur le terrain de la pratique, le seul inconvénient réel de la perpétuité des mines. D'ailleurs, —si la propriété souterraine s'acquiert facilement par quiconque en veut réellement tirer parti et lui est garantie de toutes façons, — elle est enlevée immédiatement a celui qui a manifesté, par le non paiement de ladite taxe superficiaire, exigée a l'avance, son intention de ne plus exploiter sa mine ou l'impossibilité de l'exploiter. La commission a voulu, par une sévérité qui n'est en somme qu'apparente (le propriétaire d'une mine sérieuse sera toujours en état d'acquitter l'impôt, tout au moins par un emprunt), obvier à l'accumulation de ces mines qui n'existent que sur le papier. Elle voudrait que toute mine qui, pour une raison ou pour une autre, n'est point exploitée par son propriétaire, redevînt libre, de manière à être réadjugée en temps et lieu à celui qui sera moins timide, plus habile, mieux pourvu de ressources, plus capable en un mot de la mettre en valeur.