Annales des Mines (1843, série 4, volume 4)
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passage à travers la roche , change la situation naturelle des lieux. Ce n'est plus là une servitude établie par la nature elle-même et que .le propriétaire du fonds inférieur serait tenu de souffrir. C'est un dommage causé par le fait de l'homme , et pour lequel par conséquent une réparation est due. Le concessionnaire ne saurait alléguer qu'il jouit de. sa propriété, qu'aux termes de l'article 544 du Code civil, le droit de propriété est celui de disposer des choses de la manière la plus absolue, pouvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois -ou' par les règlements ; car à côté de cette disposi-
tion, il y a cette autre règle de droit commun et formellement énoncée par l'article 1382 du même Code, que tout fait quelconque qui cause à autrui un dommage oblige
celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. La mine constitue 'bien une propriété entre les mains du
concessionnaire; mais il ne doit point en user de manière à nuire à ses voisins; s'il aggrave les charges qui résultaient des servitudes naturelles ou de celles que la loi a
établies, il est tenu d'indemniser les propriétaires. Le
jugement qui l'oblige à leur payer cette indemnité, ou qui le contraint à opérer certains travaux, tels que des fossés, des puisards, pour empêcher l'écoulement des eaux de la mine sur les fonds inférieurs, ne fait que leur accorder la réparation qui leur est due, que régler, conformément à l'équité et aux prescriptions de la loi, les droits respectifs des propriétés. Ces règles ont été appliquées dans l'espèce suivante. Les sieurs Champanhet et compagnie , concessionnaires des mines de Prades et de Niaigles, département de l'Ar-
dèche , avaient ouvert dans la montagne où ces mines sont situées des galeries pour l'épuisement des eaux inté-
rieures. Ces eaux,, ,chargées de débris de houille et de débris de substances minérales, s'écoulaient sur la pente du terrain, et, mêlées aux eaux pluviales, venaient se répandre sur les fonds inférieurs et yfleposer les matières qu'elles contenaient. Le sieur Bonnaud , propriétaire 'de-prairies au bas de la montagne, a porté plainte et assigné les concession-
naires devant le tribunal; de Largentière, en payement de dommages et intérêts. Il concluait en outre à ce qu'ils fussent contraints d'établir, à leurs. frais, des canaux ou fossés pour détourner les eaux.
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Le tribunal a accueilli ces réclamations par un jugement du 18 août 1840, ainsi motivé Considérant que les concessionnaires excipent en » vain de l'article 640 du code .civil ; car la servitude lé-
gale, proclamée par cet article, n'existe que lorsque les eaux découlent naturellement sur le fonds inférieur,
et que le fait de l'homme n'est pas venu changer les » lieux, développer ou augmenter l'écoulement ou ren» dre les eaux malsaines ou corrompues ; et d'ailleurs, » les dispositions finales de l'article précité portent que le propriétaire supérieur ne peut rien faire pour aggraver la servitude du fonds inférieur ; considérant qu'il est » évident que ce n'est pas clans l'état oit la nature les envoie que le sieur Bunnaud reçoit les eaux en question; » que c'est par le fait des concessionnaires que les eaux » arrivent sur sa propriété et y jettent leurs principes (lé. letères; que c'est l'effet de leur exploitation, dont ils sont responsables. » Sur l'appel, la cour royale de Mines a confirmé ce ju-
gement par arrêt du 4 janvier 18142 , en adoptant les motifs des premiers j uges.
Les sieurs Champanhet et Ci° se sont pourvus en cassation, ils prétendaient qu'il y avait eu violation des articles 544 , 640 et 1382 du code civil , et excès de pouvoir, en ce qu'on les avait condamnés à une indemnité, en raison d'un fait qui n'était, suivant eux, que l'exercice du droit de propriété, et en ce qu'en leur imposant l'obligation d'exécuter à leurs frais des travaux pour détourner les eaux de leur cours, on avait créé, au profit du fonds inférieur, une servitude non établie par la loi. En déposant sur le sol les produits de l'extraction , ils , qu'acte de propriétaire. Si n'avaient fait,
les eaux pluviales, en s'infiltrant dans ces produits, s'écoulaient dans les terrains inférieurs et y portaient des principes plus ou moins nuisibles , c'était là un fait dont ils ne pouvaient être responsables, attendu qu'en
qualité de concessionnaires, ils avaient le droit d'extraire la houille et de la déposer sur le sol et que, de son côté, le propriétaire du fonds inférieur était tenu de recevoir les eaux pluviales ; qu'il en était de même des eaux extraites de la mine , puisque , ayant le droit d'exploiter, ils pouvaient faire tout ce qui est nécessaire pour cette exploitation , et , conséquemment, extraire les eaux bilé-