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Perte du Rhône,
pont de
cey.
( ;6 )
Le Rhône rencontre plusieurs baries de rochers inclinés en sens contraire de sa pente , et qu'il est obligé de trancher : il s'en présente enfin un plus dur et plus épais que les autres ; le Rhône n'ayant pu le 'percer, a creusé par-dessous ; il s'y enfonce et disparaît l'espace d'environ 6o pas. M. de Saussure, qui a décrit aussi cet endroit, désigné plus particulièrement sous le nom de la Perte du Rhône , semble ne pas croire que le toit du canal souter.
rain que le Rhône y parcourt, soit rêellement formé par un banc de rocher continu , mais principalement par des blocs accumulés, qui se sont détachés du haut des parois du canal supérieur , sont tombés dans ce même canal , et ont été soutenus
par les bords saillans de la corniche. Le citoyen Boissel affirme au contraire, que le banc de rocher est entièrement fermé sur le Rhône. Au surplus, cette disparition totale du Rhône n'a lieu qu'en hiver ; dans les mois de l'été, au contraire, lorsque le Rhône est grossi par la fonte des neiges sur les hautes Alpes, ses eaux recouvrent tous les rochers. Aussi, le pont naturel qu'ils forment
en cet endroit , n'a-t-il pas suffi pour qu'on pût, dans toutes les saisons , communiquer à pied sec d'une de ses rives à l'autre : on y a construit un pont en bois, qui porte le nom de pont de Lucey. On s'était contenté d'abord de le faire porter sur le roc même ; une nuit de gelée, le roc se détacha et tomba sur la Perte, où il est encore. La terre en fut ébranlée, au point que le village voisin s'en ressentit fortement. Un grand noyer qui était planté sur la pente rapide qui domine le pont, glissa avec Je terrain lui-même : arrivé sur :la tranchée de la Perte, il y tomba en travers ; sa longueur le contint
( 57) dans cette situation , où il a servi de pont usqu'à. ce qu'on ait construit celui qui subsiste encore, et dont les culées sont en maçonnerie. Suivant l'opinion générale, ce gouffre engloutit les corps que leur légèreté devrait retenir à flot. Le citoyen Boissel annonce s'être assuré que rien
n'est moins fondé que cette opinion. Les morceaux de bois qu'il s'est souvent amusé à y jeter, finissaient par se ranger sous la corniche , mais ils ne s'engloutissaient pas. Un des habitans du village
voisin passe pour avoir fait une petite fortune à recueillir tout ce que le Rhône y apporte, et surtout à dépouiller les cadavres des malheureux qui se noient , et que le Rhône y amène peut- être depuis le lac , où les accidens sont fréquens. On a cru, au premier récit qui fut fait du voyage
du citoyen Baisse/, qu'il avait franchi ce conduit souterrain où le Rhône se dérobe entièrement à la vue l'espace de soixante pas : c'est ce qui n'est pas et ne pouvait pas être , d'après la disposition des lieux. Il nous apprend même que ses compagnons, jugeant le fleuve absolument impraticable depuis
le pont de Brezin jusqu'à la Perte à cause des deux cataractes dont nous avons parlé , refusèrent
absolument de parcourir cet espace. Il fallut se contenter de pousser le bateau dans le courant, et de l'y abandonner à lui -même sans conducteur on le vit enfiler l'arche gauche du pont naturel de Brezin , y passer avec lenteur , continuer sa route tranquillement , franchir les cataractes dont on s'était tant effrayé, sans Prendre une goutte d'eau, enfiler ensuite le canal de la Perte , glisser sur les flots tumultueux qui s'y précipitent, et,s'échouer sain et sauf sur les rochers, là où le fleuve s'en'once et disparaît.