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PROCÉDÉ. BESSEMER.
ténacité du métal, elle était presque double de celle de la fonte ordinaire. Confiant dans ce résultat, M. Bessemer se hâta de mettre son canon sous les yeux de l'empereur, et se conformant au désir exprimé par Sa Majesté, il se rendit à la fonderie de canons de Ruelle, près Angoulême, où il choisit un empla-
cement pour la construction d'un four destiné à la continuation des essais. On ne saurait s'étonner dela persistance d'un Anglais au perfectionnement de l'artillerie française, si l'on se rappelle qu'à cette époque les drapeaux de la France et de Angleterre flottaient glorieux et confondus dans la presqu'île de Crimée.
Les dessins du four projeté furent aussitôt exécutés par l'inventeur, et les matériaux de construction tels que briques réfractaires, fers d'armatures, etc., furent envoyés d'Angleterre. Sur ces entrefaites, M. Bessemer construisit à Londres un four identique avec celui de Ruelle, tous deux beaucoup plus spacieux que celui où l'on avait fait les premières expériences. Mais ces grandes dimensions amenèrent de nouvelles difficultés, et pendant que l'on achevait le four en France, M. Bessemer se prit à désespérer de pouvoir jamais fondre, dans un four ouvert, la quantité d'acier
de cémentation nécessaire au mélange avec les quatre à cinq tonnes de fonte exigées pour produire un canon. Il ne s'arrêta pas cependant en cette pénible situation de doute et d'incertitude, conservant toujours l'espoir d'une solution vainement attendue jtisqu'alors. Les essais de projectiles et les matières envoyées à Ruelle avaient coûté. jo 5oo francs, dont 10 000 prélevés sur le crédit ouvert par l' empereur ; il en fut rendu compte, et l'affaire en resta là pour le moment. Toutefois, le métal obtenu avec un mélange de fonte et d'acier pouvait déjà passer pour un résultat, car il avait de si bonnes qualités que, parvenu aujourd'hui it tenir en fu-
FABRICATION DE L'ACIER.
Sion des quantités d'acier extrêmement considérable, M. Bes-
semer produit encore dans son usine ce mélange parfaitement propre à divers usages, dont plusieurs assez importants,
tels que marteaux à forger l'acier, têtes de pilons destinés au bocardage des quartz aurifères de l'Australie, etc.
De tels marteaux employés dans l'usine Bessemer à Sheffield ont cinq à six fois la durée de ceux en fonte. M. Bessemer fait observer, à cette occasion, que le mélange de fer très-carburé avec de la fonte décarburée pro-
duit, à la fusion, un métal tout à fait différent de celui qu'on obtient en traitant ensemble la masse entière, sans décarburation préalable, jusqu'à obtenir la même proportion de carbone par le traitement.
Ce dernier mode de procéder donne un métal aigre et dur, tandis que l'autre produit un métal extrêmementtenace,
se laissant bien travailler à la lime et au ciseau, auquel le tour enlève des copeaux blancs et bouclés comme ceux du petit canon soumis à l'empereur. L'essai dont nous venons de rendre compte, et dans lequel on reconnaît le principe d'un affinage par réaction, ou de la Méthode de fabrication de l'acier au four à réverbère, décrite, en 1812, par Hassenfratz (*) , n'était donc pas resté tout à fait stérile ; toutefois, on était encore loin du but. Cependant un temps précieux s'écoulait, les frais devenaient considérables, mais en même temps le sujet semblait grandir à mesure qu'on avançait, car M. Bessemer avait compris qu'il s'agissait, non pas d'un intérêt de détail dans une industrie accessoire, mais bien d'un perfectionnement
d'importance majeure dans la grande fabrication du fer, perfectionnement bien autrement précieux pour les arts de la paix, que l'aurait été pour la guerre celui qui avait été le point de départ des expériences. (*) flassenfratz, Sidéroleclude, t. IV, p. 95 à 95.